Y A-T-IL UN PAPE EN AUSTRALIE (ou ailleurs) ?

Ouvrant (trop) ma tévé, j’ai aperçu sur tous les écrans la silhouette d’un vieillard en habit de scène rouge et blanc, indiquant à grand’peine au pilote d’un paquebot, de sa main frêle, le tracé exact du chenal de la baie de Sydney, qu’il était en train de parcourir au risque de heurter les vedettes des médias internationaux. « Qui est cette vedette du chaud-biz, qui se faufile ainsi entre les vedettes chargées de caméras », me dis-je ? 
          Ce n’était pas Mickael Jackson enfin devenu vieux : trop naturellement blanc. Ni Sean Connery : pas assez viril. Ni Nelson Mandela (l’âge correspondrait) : trop passe-partout. Ni Valéry Giscard (bien qu’il fut aussi déteint que lui).
          Non, me dit le spiqueur de la tévé, c’est le pape, vous savez, l’homme qui parle au nom de l’Occident.
          Dont il est la Conscience et l’espoir.
          J’apprends donc qu’il y a un pape encore, et ma vie s’en trouve transformée.
          La vôtre aussi, à n’en pas douter : comme il se peut que vous ne le sachiez pas, je prends la peine de lancer ce message sur les autoroutes d’Internet. Vous voilà informé, votre vie meilleure et plus légère, tout comme la mienne.
          Heureux d’être heureux.

          Cette poupée de porcelaine blanche parle : je vais enfin entendre le message de la Conscience occidentale. De quoi s’agit-il, pour que je vive enfin d’espoir renouvelé ?
           Il s’agit d’avoir honte parce que des prêtres (ce sont, je crois, des permanents de son association) ont profité de leur délégation de pouvoir pour en abuser auprès de bambins australiens, qui n’étaient même pas des aborigènes. Le pape a honte, il nous fait partager sa honte, nous invite à avoir honte avec lui.
          Et le spiqueur, très au courant semble-t-il, répète par trois fois que c’est la première fois qu’un pape a honte, et surtout qu’il le dit à la tévé.

          C’est donc avec mes oreilles devenues honteuses que je continue d’écouter la suite du discours de la Conscience occidentale : enfin, on va savoir s’il y a encore un Dieu, et surtout quels sont les chemins qui mènent à lui ! Le crooner sur son paquebot n’est-il pas un expert des chenaux compliqués et hasardeux de l’Aventure Spirituelle ?
          J’entends alors un manifeste inspiré des Verts (tendance Voynet), enrichi par Die Grünnen tendance Münich et corrigé par la toute dernière version californienne de l’écologie de demain.
          « Tiens, me dis-je, j’ai déjà entendu ça près de 1000 fois, et depuis vingt ou trente ans déjà ? La vedette, sur son paquebot, l’aurait-elle découvert hier ? » Mon bonheur est d’apprendre que l’homme en rouge et blanc est enfin au courant : la planète va mal. Il le sait, il le dit : donc, tout va mieux.
          Ensuite, il conseille aux jeunes présents (zoom de la caméra sur une jeune) d’être « les Prophètes de ce monde nouveau ». Quel monde nouveau, me dis-je, toujours naïvement désireux de partager la Conscience de l’Occident ? Celui de la honte, ou du programme écologiste ?

          La tévé étant ce qu’elle est, on passe immédiatement à la dernière étape du Tour de France. Qui suscite toujours mon intérêt passionné.
          Et dont l’intolérable suspense m’évite de réaliser que je n’ai toujours pas entendu, de la bouche de La Conscience de l’Occident, s’il y a un Dieu et comment on peut le rencontrer.
          Mais, des chemins de Dieu, qui se soucie encore en Occident ?


                           M.B., 21 juillet 2008

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