Problème palestinien ? Problème juif ?
Prendre du recul. Relire des extraits de la plus ancienne presse du monde – la Bible.
Vers l’an 1200 avant J.C., on peut lire dans le Livre de Josué : « Tous ses voisins sont unis pour combattre Israël : une coalition nombreuse comme le sable ! Mais Josué est tombé sur eux à l’improviste, les a battus et poursuivis jusqu’au Liban » (1) .
Après cette première version d’une Guerre des Six Jours qui permit l’implantation en Palestine des envahisseurs israéliens, la Bible décrit le début d’un premier génocide palestinien : « Josué attaque les villages en partant du centre, et massacre tout être vivant, sans laisser échapper personne. Tous sont passés au fil de l’épée. C’est comme cela qu’il a soumis tout le pays jusqu’à Gaza, sans laisser un seul survivant. » (2)
S’ensuivit une main-basse systématique sur la Palestine : « Les Israélites se sont emparés de tout le pays, de la vallée du Liban au Mont Hermon, du Négueb au Bas-Pays. Aucune ville n’est en paix avec eux : ils s’emparent d’elles par la violence, ils en éliminent les Palestiniens par le massacre, sans rémission. Quand il n’est plus resté aucun Palestinien, Josué a pris possession de cette terre et l’a distribuée aux tribus juives. » (3)
Après quoi le général Josué fit une déclaration officielle : « Prenez possession de leurs terres : des terres qui ne vous ont demandé aucune fatigue, des villes bâties par d’autres dans lesquelles vous allez vous installer, des vignes et des oliveraies que vous n’avez pas plantées – et qui vous nourriront. Toutes ces populations que nous avons exterminées, Dieu les a dépossédées pour vous. » (4)
Puis ce fut la création des premiers camps palestiniens : « Jéricho est enfermée et barricadée : nul n’en sort ou n’y rentre. On signale qu’après avoir pénétré dans un camp, les juifs ont massacré tous ceux qui s’y trouvaient, hommes, femmes, enfants. » (5)
Déjà, c’était « eux ou nous » – impossible coexistence : « Nous devons savoir, déclare un responsable juif de l’époque, que les populations autochtones que nous n’avons pas réussi à chasser vont constituer pour nous une menace permanente, une épine dans notre flanc et un chardon dans nos yeux. Et ceci, jusqu’à ce qu’ils nous aient rayés du sol ! » (6)
Premières protestations de l’autorité palestinienne, vers 1100 avant J.C. : « Nous faisons la guerre aux juifs parce qu’ils se sont emparés de notre pays. Rendez-nous ces terres, maintenant ! » (7)
Début des colonisations illégales et sauvages : On ne compte plus les exemples où, après affrontements avec les Palestiniens, « des juifs reviennent dans les terres spoliées, rebâtissent les villages et s’y établissent. » (8)
Et l’inexorable engrenage de la violence : « Samson déclara : nous ne serons quitte envers les Palestiniens qu’en leur faisant du mal ! » (9)
La première Intifada, la guerre des pierres ? Elle fut juive : L’adolescent « David choisit dans un torrent cinq pierres bien lisses. La fronde à la main, il courut vers le palestinien Goliath, et tira une pierre qui l’atteignit au front. Elle s’enfonça dans son crâne, et il tomba face contre terre. » (10)
Le premier terroriste kamikaze ? Un juif, arrêté après avoir incendié les récoltes des palestiniens : « Tous les responsables palestiniens se trouvaient dans un édifice, avec une foule de 3000 civils. Samson cria : « Dieu, donne-moi la force de me venger des palestiniens d’un seul coup ! » Il s’arc-bouta contre les colonnes en hurlant « Que je meure avec les palestiniens ! », puis il poussa de toutes ses forces. L’édifice s’écroula sur lui et sur la foule : les morts furent très nombreux. » (11)
En parcourant le Livre de Josué et des Juges qui relatent la chronique des XI° et X° siècles avant J.C., on croirait entendre les informations de la semaine dernière.
Rien n’a changé. En 3000 ans, rien n’a été appris.
Cette situation sans issue, et qui perdure identique depuis trente siècles, semble provenir d’une dramatique confusion. Peut-on la résumer d’un mot ?
Est juif celui qui est habité par la Loi, est juif celui qui habite la Loi.
Sitôt créé par David, le premier État juif s’est effondré dans les querelles domestiques, puis par la déportation. Et c’est dans la diaspora où ils ont passé le plus clair de leur histoire, que les juifs ont pris conscience de leur identité, qui n’est pas territoriale mais spirituelle.
Pour avoir confondu patrie spirituelle et patrie terrestre, ne se condamnent-ils pas eux-mêmes à la haine, au sang, à la guerre, à la souffrance sans fin ?
Comme me le faisait remarquer un journaliste de L’Express, « les réalités actuelles sont moins simples » que cette mise en perspective du passé et du présent.
Il faudra donc revenir, ici, sur cette question : qu’est-ce qu’être juif ?
M.B., Fév. 2011
(1) La Bible, Livre de Josué, chap. 9 et 11.
(2) Livre de Josué, chap. 10
(3) Livre de Josué, chap. 11. J’appelle « Palestiniens » les premiers habitants du pays, qui ne prendront ce nom (les phalestim) qu’à l’arrivée des Philistins, quelques années plus tard.
(4) Livre de Josué, chap. 24
(5) Livre de Josué, chap. 6. J’appelle « camps » les villages dans lesquels les Palestiniens de l’époque furent contraints de se retrancher.
(6) Livre de Josué, chap. 23
(7) Livre des Juges, chap. 11
(8) Entre autres : Livre des Juges, chap. 21
(9) Livre des Juges, chap. 15
(10) I° Livre de Samuel, chap. 17 (vers 1040 avant J.C.)
(11) Livre des Juges, chap. 16
Le livre de Josué n’est pas un livre historique.
Il a été publié au 7e siècle av. JC pour faire pièce aux menaces de la puissante Assyrie et regonfler le moral des Israélites démoralisés.
Bien entendu aucun des événements narrés dans ce livre n’a jamais eu la moindre réalité !
D’ailleurs à la date (aberrante) de 1200 av. JC que ce texte propose on ne savait pas encore écrire en hébreu. et Israël n’existait pas non plus.
Exact. Sauf que la mise par écrit de Josué date plutôt du 6e siècle : exilés à Babylone, les hébreux s’inventent des mythes fondateurs. Voyez mon essai « Naissance du Coran ».
Merci, M.B.
Ping : MARTYRE DES PALESTINIENS : LE VIEIL HOMME ET LA CLEF | Une vie à la recherche de la liberté intérieure, morale et politique