Cent vingt ans que la République française traîne un boulet : ses relations avec l’Église, avec la religion, avec Dieu. C’est que nous revenions de loin : depuis Charlemagne, le trône et l’autel ne faisaient plus qu’un, ils avaient construit ensemble la Maison France et l’habitaient sans contestation possible. En 1905 ils ont divorcé : depuis ils cohabitent sous le même toit, se regardent et s’épient. Les vieilles rancœurs, les haines recuites entre calotins et laïcards sont toujours là. Périodiquement elles ressurgissent, et alors dans la Maison France la cohabitation devient difficile.
En 1904, le chantier démarra mal : les laïcards parlèrent d’une loi qu’il fallait « braquer sur l’Église comme un revolver », d’une « éradication complète du bloc romain. » Rapporteur de la loi, Aristide Briand comprit qu’une conciliation était nécessaire pour éviter un affrontement désastreux avec les catholiques français. Sinon, ce serait à leur égard, dit-il, « un acte de déloyauté qui reste très loin de notre pensée. » Cette conciliation, il l’appela d’un mot jusque là inusité en politique, la laïcité.
Les deux conjoints acceptèrent de mauvais gré la conciliation, le divorce par consentement mutuel. Obligés de vivre ensemble, quand ils se chamaillaient l’air de la Maison devenait irrespirable.
Le 9 avril 2018, Emmanuel Macron a repris la question. Contrairement à ses prédécesseurs il n’a pas proposé un énième rafistolage entre les deux parties, un coup de peinture sur des murs lézardés : il a proposé tout bonnement de « refonder la Maison ».
I. Refonder la maison
C’est-à-dire tout refaire à neuf, à partir des fondations. Revoir le plan d’ensemble, prendre de la hauteur pour s’extraire enfin des vieilles querelles. Comme de Gaulle en 1945, c’est un projet de refondation de la Maison France. Montrer comment les deux co-locataires peuvent non seulement habiter sous le même toit, mais s’enrichir l’un l’autre. Établir une nouvelle cohabitation entre ceux qui croient et ceux qui ne croient pas, entre les anges et les hommes. Ce faisant, il sait qu’il va « braver les sceptiques de chaque bord » (1) et affirme « qu’il faut être très libre pour oser être paradoxal et être paradoxal pour être vraiment libre ».
II. Une atteinte à la laïcité ?
Ça n’a pas tardé. Dans l’heure qui suivit, les politiciens se précipitèrent sur leur smartphone pour descendre en 140 signes un exposé nuancé de 12 pages. Les premiers, les gauchistes hurlèrent au blasphème contre la laïcité. Avaient-ils entendu Macron ? « Mon rôle, dit-il, est de m’assurer que chacun ait la liberté absolue de croire comme de ne pas croire. Mais je lui demanderai de la même façon, et toujours, de respecter absolument et sans compromis toutes les lois de la République. C’est cela la laïcité ni plus ni moins, une règle d’airain pour notre vie ensemble qui ne souffre aucun compromis, une liberté de conscience absolue ».
Et encore : « Je considère que la laïcité n’a certainement pas pour fonction de nier le spirituel au nom du temporel, ni de déraciner de nos sociétés la part sacrée qui nourrit tant de nos concitoyens. Chacun a sa manière de la nommer. Comme chef de l’Etat, je suis garant de la liberté de croire et de ne pas croire, mais je ne suis pas le promoteur d’une religion d’Etat substituant à la transcendance divine un credo républicain. » Et enfin : « L’Etat et l’Eglise appartiennent à deux ordres institutionnels différents, qui n’exercent pas leur mandat sur le même plan ».
Où est l’atteinte à la laïcité ?
La France insoumise l’accusa alors de ne parler qu’aux catholiques et non à tous les Français. Macron les tacle : « Ces questions ne se bornent pas aux intérêts d’une communauté restreinte [catholique]. Ce sont des questions pour nous tous, pour toute la nation, pour notre humanité toute entière. Ce questionnement intéresse toute la France, non parce qu’il est spécifiquement catholique, mais parce qu’il repose sur une idée de l’homme, de son destin, de sa vocation, qui sont au cœur de notre devenir immédiat. Parce qu’il entend offrir un sens et des repères à ceux qui trop souvent en manquent ».
III. Le grand basculement
Ces politiciens, bloqués dans l’impasse de leurs idéologies prêt-à-porter, il les voit venir : « Depuis trop longtemps, dit-il, le champ politique était devenu un théâtre d’ombres et aujourd’hui encore, le récit politique emprunte trop souvent aux schémas les plus éculés et les plus réducteurs, semblant ignorer le souffle de l’histoire et ce que le retour du tragique dans notre monde contemporain exige de nous ». Car « trop de nos concitoyens pensent que ce qui est acquis est devenu naturel ; ils oublient les grands basculements auxquels notre société et notre continent sont aujourd’hui soumis ».
Ce grand basculement, c’est la perte du sens d’un monde pris de vertige : « Ce qui grève notre pays, ce n’est pas seulement la crise économique, c’est le relativisme. C’est même le nihilisme, c’est tout ce qui laisse à penser que ‘’cela n’en vaut pas la peine’’. Pas la peine d’apprendre, pas la peine de travailler et surtout pas la peine de tendre la main et de s’engager au service de plus grand que soi. Le système, progressivement, a enfermé nos concitoyens dans ‘’l’à quoi bon’’ ».
Privé de sens, ce monde ne sait plus vers où se tourner pour trouver son salut : « Cet horizon du salut a totalement disparu de l’ordinaire des sociétés contemporaines, mais c’est un tort et l’on voit à bien à des signes qu’il demeure enfoui. »
IV. Donner du sens
Au-delà des querelles politiciennes, Macron affirme que « nous avons besoin de donner un cap à notre action, et ce cap, c’est l’homme. Or il n’est pas possible d’avancer sur cette voie sans croiser le chemin du catholicisme, qui depuis des siècles creuse patiemment ce questionnement ». Nous y sommes ! Voilà ce qui fâche tant les laïcards : « La sécularisation ne saurait éliminer notre longue tradition chrétienne. C’est ce qu’ont apporté à la politique française les grandes figures que sont le Général de Gaulle, Robert Schumann, Jacques Delors ou encore les grandes consciences françaises qui ont éclairé l’action politique comme Clavel, Mauriac, de Lubac ou Marrou. Et ce n’est pas une pratique théocratique ni une conception religieuse du pouvoir qui s’est faite jour, mais une exigence chrétienne importée dans le champ laïc de la politique… Cette flamme commune… fait partie de notre histoire et de ce qui a toujours guidé notre pays. Le retrait ou la mise sous le boisseau de cette lumière n’est pas une bonne nouvelle ».
« Car nous ne sommes pas faits pour un monde qui ne serait traversé que de buts matérialistes. Nos contemporains ont besoin (qu’ils croient ou ne croient pas) d’entendre parler d’une autre perspective sur l’homme que la perspective matérielle…. Ils ont besoin d’étancher une autre soif, qui est une soif d’absolu. Il ne s’agit pas ici de conversion mais d’une voix qui, avec d’autres, ose encore parler de l’homme comme d’un vivant doté d’esprit. Qui ose parler d’autre chose que du temporel, mais sans abdiquer la raison ni le réel ».
V. Les ‘’racines chrétiennes’’ ?
Parvenu à ce point, Macron a le courage d’aller jusqu’au bout : « Je sais qu’on a débattu comme du sexe des anges des racines chrétiennes de l’Europe. Et que cette dénomination a été écartée par les parlementaires européens. Mais l’évidence historique se passe de tels symboles. Et surtout, ce ne sont pas les racines qui nous importent, car elles peuvent être mortes. Ce qui importe, c’est la sève. Et je suis convaincu que la sève catholique doit contribuer encore et toujours à faire vivre notre nation ».
Car « dans ce pays de France qui ne ménage pas sa méfiance à l’égard des religions, je n’ai pas entendu une seule voix se lever pour contester cette évidence, gravée au cœur de notre imaginaire collectif : lorsque vient l’heure de la plus grande intensité, lorsque l’épreuve commande de rassembler toutes les ressources qu’on a en soi au service de la France, la part du citoyen et la part du catholique brûlent, chez le croyant véritable, d’une même flamme ».
Évidemment, les gauchistes n’aiment pas qu’on leur rappelle « que les liens les plus indestructibles entre la nation française et le catholicisme se sont forgés dans ces moments où s’est vérifiée la valeur réelle des hommes et des femmes. Il n’est pas besoin de remonter aux bâtisseurs de cathédrales et à Jeanne d’Arc… de l’Union Sacrée de 1914 jusqu’aux résistants de 40, des Justes aux refondateurs de la République, des Pères de l’Europe aux inventeurs du syndicalisme moderne… oui, la France a été fortifiée par l’engagement des catholiques ».
VI. L’Église et l’État : chacun à sa place
Non seulement pour Macront ceux qui croient ont toute leur place dans la République laïque, mais ils doivent lui apporter ce supplément d’âme qui est le leur. Apporter oui, mais pas imposer : « En écoutant l’Eglise sur ces sujets, nous ne haussons pas les épaules. Nous écoutons une voix qui tire sa force du réel et sa clarté d’une pensée où la raison dialogue avec une conception transcendante de l’homme. Nous l’écoutons avec intérêt, avec respect… Mais cette voix de l’Eglise, nous savons qu’elle ne peut être injonctive. Parce qu’elle est faite de l’humilité de ceux qui pétrissent le temporel, elle ne peut être que questionnante ».
Dommage que le président emploie des mots si compliqués ! Injonctive ça veut dire tout simplement que le rôle de l’Église n’est pas de commander à la société, mais de la questionner : « l’Eglise n’est pas à mes yeux cette instance que trop souvent on caricature en gardienne des bonnes mœurs. Elle est cette source d’incertitude qui parcourt toute vie, et qui fait du dialogue, de la question, de la quête, le cœur du sens, même parmi ceux qui ne croient pas ».
C’est oublier un peu vite que l’Église catholique s’est construite pendant des siècles sur le refus du dialogue avec ceux qui ne croyaient pas comme elle, qu’elle a brûlé ceux qui questionnaient trop, qu’elle n’a pas été source d’incertitude mais catalogue de certitudes assénées au prix de la liberté et de la vie de ceux qui doutaient. L’Église idéale d’Emmanuel Macron a bien existé, mais dans la douleur et la souffrance qu’elle imposait aux libres quêteurs de sens, les mystiques.
VII. Le repli communautaire
Le passage le plus controversé de son intervention est celui où il demande aux catholiques de s’engager dans la vie politique française. Incompréhension générale : les cathos crient à la récupération, les gauchos à l’instauration d’une république des anges. C’est pourtant simple : ce que craint le président, c’est le repli communautariste des catholiques dans des mouvements comme Mariage pour tous ou Sens Commun, parce qu’ils ont fait la démonstration d’un activisme dangereux à ses yeux. Car il pourrait se heurter frontalement aux activismes musulmans ou gauchistes en adoptant les mêmes postures et les mêmes méthodes qu’eux. Ce que Macron dit aux catholiques, c’est « ne vous repliez pas sur vous-mêmes. Ce que vous portez en vous, cette flamme, intégrez-la dans le débat démocratique français ».
VIII. S’ils avaient écouté…
Les politiciens n’ont pas écouté, et s’ils ont écouté ils n’ont pas entendu. Comme des automates, ils ont ressorti leurs vieilles rengaines cuites et recuites, « éculées et réductrices ». Ce n’est pas leur faute : ils crapahutent en plaine alors que Macron évoluait dans les hauteurs. Avec un sourire gêné, l’un d’eux a même avoué : « Je n’ai pas tout compris… »
C’est que nous avons un problème avec M. Macron : tout le monde n’est pas à son niveau. Face à un tel discours, nos politiciens habitués à leurs boutiques ne sont pas à la hauteur. Mais aussi ! Pourquoi tant de phrases trop longues, cette accumulation d’adverbes, ces circonlocutions, ces propositions subordonnées en cascade, ces rebonds de nuances en nuances ? Pour être entendu, il faut faire simple et choc. Du Edmond Rostand, pas du Marcel Proust.
Dommage. C’est la première fois depuis longtemps qu’un dirigeant français tient un discours aussi puissant sur une question aussi brûlante. Prenez la peine de le lire, car sans doute dans quelques jours on n’en parlera plus. Ainsi va la politique.
M.B., 13 avril 2018
(1) les passages entre guillemets sont des citations de l’intervention de M. Macron
Bonjour,
Je remarque en lisant les commentaires à votre billet, que vous touchez à un sujet fort sensible! Ce n’est ni une nouveauté ni une surprise.
Pour ma part, je pense que sur ce point, M. MACRON a raison de vouloir remettre les choses à leur place. Si la France a été un temps catholique, elle est maintenant multicultuelle. Aussi, il faut rendre à César ce qui lui appartient, Le pouvoir terrestre de gouverner les hommes aux politiques et élus et le pouvoir spirituel de guider les âmes aux religions… Chaque élément étant bien distinct même s’il arrive qu’ils se croisent!
Cordialement,
CG
Monsieur,
Veuillez trouver, ci-dessous, un petit commentaire sur votre billet.
« Chacun a sa manière de la nommer. Comme chef de l’Etat, je suis garant de la liberté de croire et de ne pas croire, mais je ne suis pas le promoteur d’une religion d’Etat substituant à la transcendance divine un credo républicain ».
Malheureusement Macron est bien le promoteur de cette religion d’État. l’Etat est devenu la religion car le droit (l’état de droit) gouverne et moralise depuis le départ de Charles de Gaulle qui avait un idéal de la France.
La moralisation socialiste depuis Mitterrand a mis le Droit à la tête de l’Etat qui s’est ensuite aligné sur le Droit européen (cf. Zemmour, « Le suicide français »). Quand Macron dit « Pas la peine d’apprendre, pas la peine de travailler et surtout pas la peine de tendre la main et de s’engager au service de plus grand que soi. Le système, progressivement, a enfermé nos concitoyens dans ‘’l’à quoi bon’’ » il a en ligne de mire l’idéologie européenne et les grandes forces libérales qui en instaurent les règles. La réaction d’un peuple face à une société qui ne le représente plus (exemple du référendum de 2005) est soit la violence, soit l’indifférence exprimée par la participation de plus en plus faible aux élections européennes. Macron accuse les français en les culpabilisant (« ne pas travailler et ne pas tendre la main »). Souffrance et donation, nous sommes en plein dans la religion chrétienne où le péché originel est remplacé ici par la perte du sens. ‘Ah les gueux’ pense Macroute qui va en guerre (« Malbrough s’en va-t-en guerre »).
« C’est ce qu’ont apporté à la politique française les grandes figures que sont le Général de Gaulle, Robert Schumann, Jacques Delors » : nous arrivons bien à la confusion par le mélange des idéaux de ces hommes où Schumann et Delors montrent l’antithèse de de Gaulle (cf. conférence d’Asselineau sur la construction européenne). L’européisme est une extension de l’utopie hégémonique américaine que vous, Michel Benoït, dénoncez dans un billet précédent !
« Ils ont besoin d’étancher une autre soif, qui est une soif d’absolu. Il ne s’agit pas ici de conversion mais d’une voix qui, avec d’autres, ose encore parler de l’homme comme d’un vivant doté d’esprit. Qui ose parler d’autre chose que du temporel, mais sans abdiquer la raison ni le réel »
Qui peut croire en la soif d’absolu ? N’est-ce pas déjà se prendre pour Dieu ? Qu’est-ce qu’un vivant doté d’esprit sinon le constat de la dualité qui sépare l’homme de la Vie démontrant par cet écart qu’il est entièrement culturel et non plus naturel comme il se plaît (et complaît) à le croire dans une paresse mentale ! Que dit la raison du réel quand vous-même prenez les mystiques pour exemple de liberté : que voyaient-ils de la réalité ?… qui n’existe pas !
« Mais l’évidence historique se passe de tels symboles ». Ah bon, des exemples … ?
» Et surtout, ce ne sont pas les racines qui nous importent, car elles peuvent être mortes. Ce qui importe, c’est la sève. Et je suis convaincu que la sève catholique doit contribuer encore et toujours à faire vivre notre nation ». Ah bon bis (ou Banania selon les goûts) : ce ne seraient pas les racines justement qui, étant perdues, déstabilisent l’homme dans la recherche des raisons de son existence ? L’étude de l’évolution pour mieux connaître notre passé et celui de notre lignée animale serait-elle pure perte ? Quant à la sève (qu’il limite à catholique alors que bien des traditions ancestrales et régionales sculptent le discours de ce christianisme sans parler des sous-bassements architecturaux des lieux des édifices religieux) pourrait-il préciser si c’est de la sève brute ou élaborée ? Monsieur Benoît, vous qui êtes un biologiste averti, si racines inutiles alors à quoi bon une sève brute qui nourrit en eau vitale ? Quel symbole pourtant que l’eau dans la tradition chrétienne : celle de la vérité qui étanche la soif. Mais il est vrai qu’on ne parle plus de vérité dans la langue bifide du marcronisme ! Alors ne se pourrait-il pas qu’il s’agisse d’une sève élaborée produite par le conditionnement d’une culture dont nos médias d’informations qui détiennent quasiment tous les pouvoirs (« l’air du temps », un autre symbole dont le CO2 est vu comme source de pollution avec taxes et spéculations). Heureusement vous bénéficiez encore d’internet, Monsieur Benoît, dont la censure par un tiers a déjà commencé , de même que la tendance à s’autocensurer par le slogan suicidaire, larvaire et à diffusion virale du » ça ne me dérange pas d’être observé car je n’ai rien à cacher » que dénonce un Dupont-Moretti en remettant à l’endroit cette inversion de valeur pas plus tard que ce dimanche 15 avril « c’est justement parce que je n’ai rien à cacher que je n’ai pas besoin d’être surveillé ».
« …au cœur de notre imaginaire collectif : lorsque vient l’heure de la plus grande intensité, lorsque l’épreuve commande de rassembler toutes les ressources qu’on a en soi au service de la France, la part du citoyen et la part du catholique brûlent, chez le croyant véritable, d’une même flamme » : encore un symbole où il est fait allusion au coeur de Jésus, à moins que je ne sache décrypter un discours, avec l’utilisation d’un mot très significatif comme « imaginaire » faisant appel à une fonction élaborée par un cerveau, qui en devient une sécrétion – thèse chère aux matérialistes, et non le reflet d’un corps individuel et collectif où le terme inconscient est plus approprié. Mais n’abordons pas cette pente psychologique car elle mettrait Macron sur la piste glissante d’une réflexion analytique à propos du narrateur lui-même !
« VI. L’Église et l’État : chacun à sa place
Non seulement pour Macront ceux … » : Cette petite erreur d’écriture en rajoutant un « t » à Macron fait surgir de l’inconscient un sens, une sorte de signature par la plume d’un ange farceur. Que dirait la psychanalyse de la conjugaison d’un « ont », le passage du « on » d’un nom singulier au « ont » verbe au pluriel ? Ne vous faites vous pas le décodeur involontaire en dénonçant par ce « t » ceux qui ont rédigé le texte, une mafia qui compte bien faire une arnaque : ils maqueront. Je vous laisse réagir à ce propos humoristique que j’amplifierai par mon « imaginaire » en retournant le « n » en « u » pour confirmer que mon idée saugrenue du « Macrout s’en va-t-en guerre » révèle, par votre « pré-voyance », une place toute particulière chez ce président qui a maille à partir avec l’armée (voir la démission du Chef d’Etat Major en début de mandat. Encore un symbole et acte premier qui engendre et déclenche l’acte guerrier d’une frappe illégale sur le plan du Droit International). Alors, en effet, chacun à sa place et chacun aura sa place pour l’holocauste !
Continuons après cet a parte.
« Dommage que le président emploie des mots si compliqués ! » Pourquoi dommage ? C’est le discours de l’autorité, celle qui prend le pouvoir sur l’ignorance de celui qui l’écoute. C’est un classique de la dialectique Monsieur Benoît. Avec votre passé de scientifique et d’homme d’Eglise vous le savez bien ! Vous devriez même le dénoncer car quand on sait, quand on a appris plus que les autres, alors la transmission du savoir et l’instruction deviennent un devoir.
Or vous justifiez au contraire le sens que Macron suscite aux auditeurs en voulant expliciter ses dires (qui commencent à devenir ésotériques) » d’Injonctive ça veut dire tout simplement que le rôle de l’Église n’est pas de commander à la société, mais de la questionner »: ça c’est votre interprétation ! Une définition qui se trouve sur internet est : « La phrase injonctive ou impérative sert à donner des ordres, des conseils ou une interdiction. » Pas la peine de minimiser et de caresser dans le sens du poil l’homme que vous défendez car votre pensée est similaire par certains aspects « impératifs » que vous n’osez vous avouer, qui vous contraignent même, on le sent bien par cette volonté d’ajouter encore une citation qui permettra de vous en défendre dans le paragraphe qui le suivra : « l’Eglise n’est pas à mes yeux cette instance que trop souvent on caricature en gardienne des bonnes mœurs. Elle est cette source d’incertitude qui parcourt toute vie, et qui fait du dialogue, de la question, de la quête, le cœur du sens, même parmi ceux qui ne croient pas ». Pardonnez-moi, mais le « cœur du sens » provient de la connaissance de soi. On en est loin … L’incertitude est votre problème. J’espère que vous comprendrez mon intention fraternelle en mettant en relief la conflictualité injonction/incertitude qui trouble l’honnêteté de votre pensée et votre courage d’analyse.
Vous dites : « C’est que nous avons un problème avec M. Macron : tout le monde n’est pas à son niveau. Face à un tel discours, nos politiciens habitués à leurs boutiques ne sont pas à la hauteur. Mais aussi ! Pourquoi tant de phrases trop longues, cette accumulation d’adverbes, ces circonlocutions, ces propositions subordonnées en cascade, ces rebonds de nuances en nuances ? Pour être entendu, il faut faire simple et choc. Du Edmond Rostand, pas du Marcel Proust. »
« Dommage ». Oui c’est dommage que tout le monde ne pratique pas la sémiologie (ni les soi-disant élites et encore moins l’homme de la rue, les sans-dents !) Les scribes de Macron en ont quelques connaissances et hypnotisent le quidam avec les belles paroles de gros matous (cf. « Gouvernement des chats au pays des souris » de Tommy Douglas, 1944) qui, au plus ça ronronne en termes abscons, au plus on les prend pour intelligents. Les élites en profitent et en abusent : il est logique que le peuple soit désabusé. Mais il n’est pas indifférent comme dit un Président sans état d’âme où le mensonge caractérise le personnage dans toute sa pathologie.
Je connais votre sens de l’exactitude que vous prouvez par vos analyses historiques et j’espère que vous accepterez ces quelques remarques pour ce qu’elles sont : une réaction face à des sociétés d’intérêts financiers qui pervertissent le concept même de démocratie*. Se faire l’avocat de quelqu’un (diable!) est indubitablement un exercice périlleux.
Salutations sincères
* Voir par exemple la non reconnaissance des référendums aux Pays-Bas et l’abolition de ceux-ci concernant les affaires européennes (https://www.ouest-france.fr/europe/pays-bas/les-pays-bas-suppriment-le-referendum-5592281)
Merci de votre longue réflexion. Je n’y répondrai pas en détail dans la limite de cette fenêtre d’Internet. J’ai voulu signaler que M. Macron avait le courage d’aborder frontalement une plaie française, les relations République/catholicisme. Ce dernier a bien façonné notre pays, pour le meilleur et pour le pire, depuis Clovis. Tâcher de sortir de l’impasse en reconnaissant à chacun sa place, c’est un bel effort. Ensuite, on peut tout critiquer, mais il ne faut pas tout mélanger !
Amicalement, M.B.
Bonsoir Michel Benoit,
Je vous cite :
« Non seulement pour Macron ceux qui croient ont toute leur place dans la République laïque, mais ils doivent lui apporter ce supplément d’âme qui est le leur. Apporter oui, mais pas imposer : « En écoutant l’Eglise sur ces sujets, nous ne haussons pas les épaules. Nous écoutons une voix qui tire sa force du réel et sa clarté d’une pensée où la raison dialogue avec une conception transcendante de l’homme. Nous l’écoutons avec intérêt, avec respect… Mais cette voix de l’Eglise, nous savons qu’elle ne peut être injonctive. Parce qu’elle est faite de l’humilité de ceux qui pétrissent le temporel, elle ne peut être que questionnante ».
« Le passage le plus controversé de son intervention est celui où il demande aux catholiques de s’engager dans la vie politique française. »
« Apporter oui mais pas imposer… avec respect …. non injontive …. » mais vous n’entendez pas toute l’hypocrisie de ce discours ? Je comprends mieux pourquoi il veut que les catholiques s’engagent dans la politique. Oh, un simple fait exemplaire des faits (que vous pourrez associés à ses belles paroles):
Vu la décision solitaire et opaque (l’Allemagne, l’Italie, le Canada s’y sont refusés….) de Mr Macron d’intervenir militairement illégalement en Syrie, au risque d’embraser la planète, il y a un avant gout de l’histoire de l’église, non ? …. c’est une déclaration de guerre non dite pour une affaire non prouvée avec un faux air « des armes de destructions massive » de 2003, et ce, sans aucun mandat de l’ONU, en violation indiscutable du droit international … et sans avoir obtenu l’aval préalable des parlementaires français, en vertu de l’article 35 alinéa 1 de la Constitution qui pose que « la déclaration de guerre est autorisée par le Parlement ».
…. après tout, je préfère juger aux actes qu’aux paroles. et oui ….encore un catholique au pouvoir.
excusez moi de ce coup de gueule Michel Benoit, mais tout cela me met bien en colère. Ce n’est pas un courant d’air frais qui passe, c’est relent bien puant.
Cher Michel Benoit,
Je comprends votre réponse et vous en remercie. Mais pour ces « vrais croyants », quel est l’intérêt de rester au sein de cette organisation socio-politique qui salit à peu près tout ce qu’elle touche ? Qu’ils le veuillent ou non, ils apportent (peut-être malgré eux ?), une caution morale à l’édifice. Par ailleurs, s’ils sont cultivés au plan historique, et qu’ils sachent que tout cela repose sur une série de mensonges (que vous avez mis à jour), pourquoi ne partent-ils pas en « claquant la porte » ?
N’ont-ils pas peur de la souillure de leur dignité, de leur honneur ? Quel intérêt ont-ils à demeurer au sein de cette structure despotique ? Quelle est leur hauteur de vue ? Quelle est leur morale ? Quelle est leur éthique ?
Vraiment, j’ai beaucoup de mal à comprendre leur démarche. Mais il est vrai qu’on la morale de ses intérêts alors… c’est une perspective qui reste à étudier…
Bien amicalement,
H de D.
C’est en effet un mystère : que tant d’esprit supérieurs (je pense par ex. à Thomas d’Aquin) se soient enfoncés jusqu’au bout dans des dogmes absurdes… Mais le même Thomas, à la fin de sa vie, refuse de continuer à écrire la Tertia Pars de sa Somme Théologique (qui reste inachevée). Parce que, dit-il « Je ne sais pas si j’ai bien parlé de Dieu. Mais je sais maintenant que tout ce que j’en ai dit n’est que de la paille ».
Voilà la réponse…
M.B.
Ce discours est un discours purement politique adressé aux catholiques. Sa source est purement technocracique, dont la technicité, ici fondamentalement hypocrite, provient tout droit des grandes orientations des politiques europeennes (GOPÉ). Il y a une séparation de toute Eglise et de l’Etat en France…..mais ce n’est qu’un écrit sur du papier qui n’engage que ceux qui y croient. Car malheureusement, ces deux institutions fabriquées sur les bases du Pouvoir, ont trop besoin l’un de l’autre. Le Vatican est avant tout un Etat, avec une puissance plutot interressante….. Je ne me laisse pas séduire par ce genre de discours. Ce dernier est peut etre imprégné, certes, de la propre foi, de Mr Macron mais n’oublions pas ce qu’il y a derriere ce grand enfant intelligent : il y a des députes européens, des Etats et une présence etats unienne.
Amicalement.
Serge.
Bien sûr c’est un discours politique, on n’attend rien d’autre d’un dirigeant à ce niveau. On peut le lire comme purement politique – politicien. Mais contrairement aux habituelles déclarations politiques dans ce domaine, Macron ici va plus loin. Il va chercher le « cœur du sens » au-delà des combines politiques. C’est assez rare pour être souligné. Ne voir que la manœuvre politique, c’est rester en rase campagne comme nos politiciens.
Est-ce qu’un courant d’air frais dans la Maison vous enrhume ?
M.B.
Cher Michel Benoit,
Je ne m’étonne plus de l’enthousiasme que vous témoignez à chaque sortie de Monsieur Macron…
Il est vrai qu’il a fréquenté l’enseignement catholique, et qu’il vit avec une femme plus âgée que lui de… 24 ans (soit une génération) ! Je ne développerai pas davantage ces deux vérités.
Néanmoins, à propos du « lien » qui unirait l’église catholique à l’état je m’interroge sur vos propos.
Vous avez dit, écrit, que Jésus n’avait jamais fondé d’église et je suis entièrement d’accord avec vous. De plus, quand on reprend la trajectoire de l’église catholique qui est donc fondée sur un mensonge éhonté, que trouve-t-on ?
Des mensonges, encore des mensonges, de l’hypocrisie, des milliers de crimes commis en son nom, des viols autorisés (notamment pendant les croisades), de la pédophilie non dénoncée depuis la nuit des temps, des malversations financières, l’exploitation insidieuse de la culpabilité névrotique ordinaire des personnes (j’ai passé une bonne partie de ma vie professionnelle à soigner ces gens meurtris au plus profond…), la Fondation Lejeune qui, au nom de l’église catholique, terrorise des femmes qui souhaitent avorter (cette organisation, bien que condamnée plusieurs fois continue à être régulièrement invitée à faire des conférences dans l’enseignement catholique. Vous le saviez ?), etc., etc…
Vous même l’avez quittée pour les raisons que l’on sait !… Alors où est la place de l’Homme dans cette funeste structure ?
C’est donc avec cette organisation criminelle que l’état devrait rétablir un lien rompu (sic) ou abîmé (re-sic) ?
Mais alors selon quel principe, selon quelle motivation (s) ?
Personnellement, je n’en vois pas !
Amicalement,
H de D.
Il y a l’organisation socio-politique que vous décrivez, avec ses « crimes » (et vous en oubliez !). Et puis il y a les quêteurs de sens à l’intérieur de cette Église, ceux que Macron appelle « les vrais croyants » et que j’appelles « les mystiques » – il faudra revenir sur ce terme et ceux qu’il recouvre. Ils ont toujours été mal vus, persécutés par l’Église. Pourtant ce sont eux qui portent le sens. L’Église dont parle M. Macron est idéalisée, ou plutôt c’est sa part cachée, mais réelle. Car il y a bien deux Églises, l’une dans l’autre, l’une malgré l’autre. Je vais revenir là-dessus prochainement, avec votre aide.
M.B.