(Brève) RÉPONSE A UNE JEUNE MUSULMANE

          Une jeune femme (19 ans) que je ne connais pas, vient de mettre un commentaire sur ce blog. Je me permets de lui répondre ici, très rapidement.
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          Voici les extraits significatifs de son texte :
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          En tant que musulmane, je pense que la base du dialogue entre les juifs, les chrétiens et les musulmans serait que chaque religion accepte l’autre. Les musulmans à l’image de notre prophète reconnaissent Noé, Abraham, Moise Jesus etc en tant que prophètes? Mais en est-il de même pour les chrétiens et les juifs ? Reconnaissent-ils vraiment Mahomet comme le messager de Dieu porteur d’un mesage divin tout comme le fut Moise et Jesus ?
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          On retrouve en effet des « influences » juives et chrétiennes dans Le Coran, et pour cause. La Bible, Les Evangiles et le Coran proviennent du meme Dieu, non ? Dieu n’aurait pas lieu d’être s’il revenait sur ce qu’il disait, à chaque fois qu’il envoyait un ecrit saint par l’intermediare d’un Prophète !
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Chère amie,
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          Vous posez, de façon limpide, le problème de fond qui rend impossible toute convergence entre musulmans et chrétiens.
          Vous dites (et c’est le dogme fondateur de l’islam) : Dieu n’aurait pas lieu d’être s’il revenait sur ce qu’il disait, à chaque fois qu’il envoyait un ecrit saint par l’intermediare d’un Prophète !
          Pendant plus de quinze siècles, les chrétiens ont fermement cru que les évangiles avaient été écrits par des hommes inspirés : ce qu’ils écrivaient ne venait pas d’eux, mais de l’Esprit Saint qui parlait à travers eux. Certains chrétiens (on les appelle fondamentalistes) le croient toujours. Tout comme ils croient que le Pentateuque, la Thora des juifs (les cinq premiers Livres de la Bible) ont été dictés par Dieu à Moïse. Ils ressemblent exactement aux fondamentalistes musulmans.
          Si l’on se tient à cette croyance, bien évidemment Dieu ne peut pas dicter une chose un jour, et son contraire un ou deux siècles plus tard. Il y a donc nécessairement progression de la Révélation, chaque prophète faisant faire un pas de plus à cette Révélation (sans annuler celles qui précèdent). Et c’est pourquoi le Coran présente son auteur comme le sceau des prophètes, et le Coran s’attribue à lui-même le titre de dernière Révélation.
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          On sait maintenant que les choses ne se sont pas passées ainsi. Mais il a fallu batailler ferme, dans le monde catholique, pour parvenir à une conception plus exacte de la Révélation. Ce qu’on appelle l’exégèse historico-critique (l’application à la Bible des techniques de lecture valables pour tout texte ancien) n’est autorisée officiellement chez les catholiques que depuis 1943 !
          Je ne ferai pas dans cet article – qui est plutôt une lettre amicale – un exposé de ce qu’est cette méthode de lecture, valable pour la Bible comme pour le Coran. Tous mes livres sont le fruit de cette méthode, que j’essaye d’appliquer avec discernement. Et sans oublier jamais qu’il ne s’agit pas de textes « morts », mais de textes pour vivre.
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          En un mot :
          « Dieu » n’a pas dicté le Coran à un Muhammad inculte, par l’intermédiaire de l’ange Ghibraïl. Cette croyance, c’est le dogme musulman, qui a été imposé, bien après la mort de Muhammad en 632, à l’Umma en formation – et pour des raisons politiques.
          Le résultat, c’est l’islam.
          Exactement comme les évangiles ont été mis par écrit, bien après la mort de Jésus, par des hommes qui ne cherchaient pas seulement à transmettre un souvenir, une mémoire de Jésus, mais aussi à établir un pouvoir politique – et ils ont parfaitement réussi.
          Le résultat, c’est le christianisme.
          Quelques chercheurs, presque tous d’origine chrétienne, et extraordinairement discrets, travaillent le texte du Coran selon les méthodes historico-critiques. C’est un immense travail, il a fallu un siècle et des centaines de chercheurs pour que le monde catholique découvre une autre vérité que celle du dogme de la Révélation, « dictée » par Dieu à des hommes.
          Ce travail, les penseurs musulmans ne l’ont pas encore commencé. Quelques-uns (peu nombreux) tournent autour, sans oser s’y aventurer, car leur vie est en jeu.
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          Il n’y aura pas de rapprochement possible entre musulmans et chrétiens (entre musulmans, chrétiens et juifs) tant que les musulmans ne s’attelleront pas, avec courage, à cet énorme travail de démythologisation du texte du Coran.
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          Peut-être, alors, découvriront-ils ce que j’ai esquissé dans le chapitre 59 du Secret du treizième apôtre. Vous vous doutez qu’en 3 pages, je n’ai pas pu faire état des résultats d’une recherche à peine esquissée ! Je n’ai fait qu’en donner les principaux résultats. Et dans le cadre d’un roman, ce qui « passe mieux ».
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          Que vous dire d’autre ? Que pendant tous ces siècles où l’obscurantisme régnait sur la chrétienté, justifiant le pouvoir des papes et des évêques, il s’est trouvé quantité de grandes âmes pour découvrir « Dieu » à travers le dogme imposé, et malgré lui.
          Et des anonymes innombrables, une foule de sans-voix, admirables, qui en ont fait tout autant.
          Car « Dieu » n’est pas lié par les convoitises humaines : il se laisse trouver, même à travers le mur épais des mensonges dogmatiques, par les coeurs purs.
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          C’est peut-être cela, l’humour de Dieu : ce pied-de-nez qu’il fait aux prélats mitrés, aux imams, mollah et autres ayatollahs : « Dites toujours : vous n’empêcherez pas ces petits qui me cherchent, de me trouver ».
          En attendant que l’islam évolue, et qu’il le fasse en profondeur, dans la paix, je vous souhaite ce même humour, jour après jour.
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                             M.B., 27 août 2008

P.S. : Vous trouverez, dans les catégories « ISLAM, JUDAISME, CHRISTIANISME » de ce blog, quelques « prudentes » réflexions à ce sujet.




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