« Il importe de construire le présent à travers le passé » (J. Semprun)
A l’âge de sept ans, jamais je n’avais entendu parler de Dieu. Ni de Jésus, des anges et du Saint Frusquin. Le Paris d’après-guerre était une ville blessée qui laissait voir sans pudeur les stigmates de ses lâchetés et de ses résistances. Les gens continuaient de raser les murs, ne se parlaient pas, avaient le regard soupçonneux des vaincus. Dans notre beau quartier, la bourgeoisie industrieuse tentait d’oublier ses abaissements devant l’occupant, de se relever et de reconstruire la France. Adonnés à leurs tâches mystérieuses, mes parents m’avaient abandonné aux domestiques en me privant d’affection. Dans ce milieu le bon ton voulait que les enfants, laissés à eux-mêmes, fassent leur ‘’première communion’’ – étape initiatique nécessaire pour pénétrer dans une société incroyante, indifférente à tout sauf à elle-même et aux règles d’une bienséance séculaire. Lire la suite