Jamais jusqu’ici le Vatican n’avait varié de sa position traditionnelle : la sexualité humaine ne peut avoir qu’un seul but, faire des enfants.
Le plaisir partagé ? C’est un à-côté de l’amour, pas sa finalité (1).
Si on fait l’amour, c’est pour procréer.
Or donc, le préservatif est à jamais inconciliable avec le catholicisme.
Mais voilà qu’un livre est paru, où le pape, pour la première fois, semblerait justifier son usage… Ô Ciel ! Ce pape annulerait-il tout ce que ses prédécesseurs ont toujours enseigné ?
Suivons sa déclaration à la trace.
Dans son édition du samedi 20 novembre 2010, l’Osservatore Romano publie en avant-première des extraits du livre d’entretiens du pape avec un journaliste allemand, destiné à être traduit en plusieurs langues. Selon l’Osservatore, le Pape a déclaré que :
« l’utilisation du préservatif, pour des cas particuliers comme un prostitué, peut être un premier pas vers une moralisation, une humanisation de la sexualité ».
Il faut savoir que, depuis sa fondation en 1861, l’Osservatore Romano est l’organe officiel du Vatican. Il joue le même rôle que le Journal Officiel en France : c’est là, et là seulement, qu’on trouve la version authentique des propos du Pape.
Or, dans l’édition allemande qui paraît 3 jours après l’Osservatore, comme dans sa traduction française, on peut lire que :
« l’utilisation d’un préservatif peut constituer un premier pas sur le chemin d’une sexualité vécue autrement, une sexualité plus humaine. » (2) .
On voit qu’il manque deux mots, qui changent tout :
1) « Un » (pas une : Relation homosexuelle)
Dans cette relation, de toute façon il n’y a aucun risque que soit engendré quoi que soit. Le crime a été commis en amont de la semence, au moment où l’homosexuel commence à passer à l’acte. Sa semence a été détournée de sa destination naturelle avant son émission, par la nature même de la relation sexuelle.
Alors, semence perdue pour perdue… ça ne compte pas.
2) « Prostitué »
Le pape précise qu’il n’envisage pas qu’une relation homosexuelle puisse être un acte d’amour. Il la réduit à un geste tarifé, donc dégradé, infrahumain. Il écarte l’idée que deux hommes puissent faire l’amour… par amour.
En éliminant ces deux mots de sa version destinée au public allemand, puis français et italien, le journaliste fait dire au pape ce qu’il n’a jamais dit, ce qu’il ne peut pas dire : que la relation sexuelle pourrait avoir une autre finalité la reproduction. Qu’elle pourrait tirer sa valeur divine du plaisir partagé.
Ensuite, il évite de heurter les homosexuels, « des gens qui ne pratiqueraient le sexe qu’en l’achetant ».
Enfin, il trompe les chrétiens en leur laissant croire que l’utilisation du préservatif « peut constituer un premier pas sur le chemin d’une sexualité vécue autrement ».
Et puis, il trompe l’opinion publique. Qui, à vrai dire, s’en balance.
M.B., déc. 2010
(1) Voir mon bref article de 2009, Dieu nous préservatise du pape ! (cliquez).
(2) Lumière du Monde, paru le 27 novembre 2010 aux éditions Bayard, p. 141.