AUX LECTEURS

 Depuis 30 ans, par des livres, des conférences, des interventions médiatiques, des articles dans ce blog, j’ai tenté de proposer un éclairage sur l’actualité à la lumière de mon expérience peu banale et de l’étude des sources. Peu à peu, chemin faisant, des lueurs apparaissaient, des certitudes se faisaient jour. Et ce fut merveilleux, ce partage avec tant de lecteurs et d’auditeurs.

Mais les ténèbres, comme une haute muraille de nuages noirs, avançaient vers nous depuis l’horizon. La violence et la haine gagnaient chaque jour en intensité. Aujourd’hui, elles semblent remplir l’espace. Extension des totalitarismes, renforcement des dictatures, recul de l’écoute, de la considération d’autrui, de la collaboration entre peuples. Mise à l’écart des valeurs humaines fondamentales, pour lesquelles nos grands-parents ont combattu au milieu du vingtième siècle.

Entre 1945 et la fin des années 1970 il y eut une sorte de parenthèse. Garante de la paix, une Organisation des Nations Unies leur permettait de se parler. L’arme atomique allait rendre impossible une troisième guerre mondiale. De Kennedy à Deng Tsiao Ping et Gorbatchev, d’Helmut Kohl à Mandela et Lech Walesa, des dirigeants faisaient souffler le vent de la démocratie. Le bonheur semblait à portée de main sur une planète encore intacte – ou presque.

Tout cela est fini. Partout, la démocratie libérale recule. Des empires se créent en lui tournant le dos : selon eux elle serait inefficace, mensongère, aveu et source de faiblesse. Seule la poigne et l’autorité de quelques-uns peuvent (disent-ils) assurer la sécurité de tous – à condition que tous soient dociles, décérébrés et muets. Par une étrange perversion, quelques intellectuels français vantent même les démocraties illibérales – deux mots qui s’entendent comme l’eau et le feu. Quant à la planète, sous nos yeux impuissants elle s’épuise rapidement.

Le monde décrit dans le roman 1984 de George Orwell (le mensonge du haut en bas des sociétés, la vérité disparue) n’est plus une fiction. C’est devenu notre réalité quotidienne.

Historien, j’ai croisé dans le passé trop de ces horreurs dont sont capables les humains. Naïvement, je pensais que nous autres, modernes, nous allions en tirer les leçons et faire mieux. Et voici que ça recommence, cette spirale qui nous entraîne vers le bas dans un tourbillon que personne ne maîtrise.

Que dire et quoi écrire, dans ce monde-là, dans cette ambiance-là, avec cet horizon-là ? Quel espoir collectif chercher dans les traditions du passé, dans les sociétés du présent ? Comment ne pas être hypnotisé par le gouffre vers lequel nous nous dirigeons en aveugles consentants ?

Cet aujourd’hui-là n’est pas disposé à entendre autre chose que ce qui le mène au pire. Et l’écrivain respectueux de ses lecteurs n’a plus rien à dire. Même s’il sait qu’il y a autre chose sur terre que le néant, il n’a plus envie que de se taire. Pourquoi parler à ceux qui ne veulent rien entendre ? Comme « ma Sœur Anne du haut de sa tour », il ne voit rien venir de bon sur le chemin qui poudroie.

En rangeant mon grenier, je suis tombé par hasard sur un épais dossier, oublié là depuis quarante ans. Des dizaines de feuillets, écrits alors que j’avais atterri dans une paroisse de banlieue parisienne au début des années 1980. N’étant pas prêtre, on me demandait seulement d’intervenir après la lecture de l’évangile, pour le commenter.

 C’était la fin de cette parenthèse évoquée plus haut. On ignorait alors que le monde, qui semblait en paix, n’était en fait qu’entre deux guerres. Affaiblie, l’Église catholique n’avait pas encore disparu du paysage social. La paroisse où j’officiais était vivante, et des centaines de personnes se réunissaient aux messes dominicales. C’est à elles que je m’adressais.

En les relisant, je m’aperçois que ces sermons sont encore pleins de cet optimisme disparu depuis. Aussi bien moi que les paroissiens, nous pensions et croyions alors que nous pouvions changer quelque chose au monde dans lequel nous vivions.

C’est pourquoi, sous le titre La fin des illusions, je vais désormais retranscrire ici ces commentaires de l’évangile datant de la fin de ma ‘’période catholique’’. Plus aucune structure religieuse ou politique ne peut aujourd’hui nous guider et nous entraîner. Le salut et la marche en avant, qui pouvaient autrefois être vécus collectivement, sont désormais individuels. Nous sommes seuls pour réagir aux défis qui nous attendent.

Puissent les convictions et les naïvetés de cette époque révolue vous rafraîchir en ces temps de disette humaine et spirituelle.

Pour ne pas oublier qu’un autre monde est toujours possible.

                                                             M.B., 17 octobre 2022

14 réflexions au sujet de « AUX LECTEURS »

  1. Ping : UN PROGRAMME (« les neiges d’antan » II) | Une vie à la recherche de la liberté intérieure, morale et politique

  2. Jacquot Pascal

    Les années passent et nous passons avec elles … mais la richesse de notre cheminement ne peut se confondre avec nos éventuelles déceptions et devenir amertume !
    Si tu t’effaces momentanément pour essayer de conserver ton équilibre, je le comprends facilement et j’admire ta sagesse … Pourtant tes compétences, la clarté de tes propos, la simplicité de tes images m’ont toujours parlé et peuvent encore aider ceux qui te font confiance !
    Nous traversons un époque difficile, c’est évident et nous avons encore davantage besoin d’apprécier les étoiles qui continuent à scintiller … Si ton expérience peut encore aider certaines à ne pas perdre leur éclat et que tu as plaisir à nous faire ce cadeau personnel, je te remercie à l’avance … en te faisant entière confiance et avec toute ta liberté !
    En toute amitié.

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    1. Michelbenoît-mibe Auteur de l’article

      Oui, j’ai peut-être cédé à un coup de mou ? Mais en relisant ces homélies d’il y a 40 ans – un monde en-allé avec le (mauvais) vent, je m’aperçois qu’elles me parlent encore. Peuvent-elles parler aux lecteurs de 2022 ? Je vais poursuivre encore pendant qques semaines à raison d’1 tous les dimanches. Et tu me diras.
      Merci !
      M.B.

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  3. Ping : AIMER ( la fin des illusions, I ) | Une vie à la recherche de la liberté intérieure, morale et politique

  4. Combe

    Dommage ! Certes la période est complexe. Les Etats voyous menacent nos démocraties. L’église catholique est déjà en dislocation larvée. Mais on a besoin moins de directives que de témoignages. Il me souvient de l’époque où tu étais venu chez moi près de Montpellier. J’avais été dans l’impossibilité de te recevoir à mon domicile mais je t’avais fait stationner ta caravane sur un terrain qui est devenu le jardin d’un très confortable Ehpad. Mais il y avait à côté un container à bouteille. Tu l’avais pris pour une déchetterie et tu me disais avec humour que tu étais bien à ta place, là à côté. Tu étais alors un peu au creux de la vague. Je me souviens d’avoir discuté avec toi, de t’avoir longuement écouté. Tu avais un art de synthétiser, d’offrir un panorama là où on ne voyait qu’un évènement de l’histoire. Et puis de t’avoir dit : si tu savais le nombre de gens qui ont besoin de ta parole, de ton témoignage, de tes commentaires des évangiles, de l’histoire de cette église qui n’a pas toujours été comme aujourd’hui… Je t’avais indiqué quelques organismes à contacter pour y faire des conférences… Et puis la machine est repartie. Et j’ai su les nombreuses interventions que tu as faites en plus de tes écrits.
    Je me suis permis de rappeler cette époque. Excuses-moi ! Aujourd’hui encore quantité de gens attendent au moins ton témoignage, tes réactions face à leurs incertitudes et leurs doutes, une parole sur ce qui fonde ton espérance et la nôtre. Bonne route. Amicalement, si tu l’acceptes ! Jean.

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    1. Michelbenoît-mibe Auteur de l’article

      Merci de rappeler ce souvenir d’un temps en-allé avec le vent.
      Tant que j’en serai capable (mes yeux déclinent) je continuerai à dire les « Mirabilia Dei », les merveilles de Dieu. En bosses ou en creux. Mais je me tourne de + en + vers l’essentiel, qui tient en très peu de mots.
      Amicalement, M.B.

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  5. DE BEAULIEU

    Bonjour,
    Quelle bonne idée, mais ne pensez-vous pas les compléter en les « actualisant » un peu, car la parenthèse n’est plus « enchantée » ? Pour ma recherche personnelle, ou dans le souci d’animer mensuellement une « Lectio Divina », je me nourris des commentaires de Marion Muller Colard (« Eclats d’Evangile »), de Marie Noëlle Thabut, de Mgr Martin (https://soundcloud.com/p-re-basile), et de http://lhomeliedudimanche.unblog.fr/
    Très œcuménique, vous voyez….
    Sinon, concernant vos interrogations (peu fréquentes) sur l’Au-delà, et au sujet desquels un lecteur vous a justement rappelé le gros travail de Jean Prieur, je n’ai pas trouvé d’ouvrage plus clair, complet et actualisé que le livre de Lytta Basset, sorti en septembre « Cet au-delà qui nous fait signe » (titre un peu piqué à celui de Jean Prieur « Cet au-delà qui nous attend ».
    Suis moi-même modeste secrétaire de l’association « Mouvement de l’Espérance Arnaud Gourvennec », qui a comme site https://mouvement-esperance-arnaud-gourvennec.org/ et où je mets chaque semaine une citation de messagers « christiques » , de « Dialogues avec l’Ange », ainsi qu’un lexique des « Lettres de Pierre ».
    Comme vous êtes féru des Evangiles, je vous conseille particulièrement « Le Christ en vous », avec des références bibliques presque à chaque page. Ces messages de « Bertha » datent d’avant la première guerre mondiale, et on y évoquait déjà le réchauffement climatique.
    Sans être, je crois, « flippé mystique », encore moins « tradi », j’essaie d’être éclectique et surtout ouvert sur tous les écrits qui me touchent. Au passage, je vous remercie pour les vôtres.
    Bonnes lectures et bonnes écritures à venir
    Olivier
    PS Je n’accroche pas tellement avec Maria Valtorta, mais j’aimerais bien avoir vos impressions.

    Répondre
    1. Michelbenoît-mibe Auteur de l’article

      Merci de toutes ces références. En vieillissant, on se rapproche (?) de la simplicité. Ma lectio divina c’est 1) Un (passage de) Psaume, à la suite. Voilà 60 ans que je les fréquente, et chaque jour ils me parlent comme au 1er jour 2) Un passage des évangiles, à la suite, dans le texte grec. Il me faut plus d’1 an pour les lire tous les 4, avant de recommencer 3) Un passage d’un(e) mystique, Thérèse d’Avila ou en ce moment M. Yvonne-Aimée de Malestroit, ou la Philocalie, ou autre. Le but n’est pas de lire, mais d’appeler le silence et de l’habiter. Je suis donc « flippé mystique » et heureux de l’être.
      je vais aller voir Prieur et Basset. Et bien sûr, quand j’aurai « quelque chose à dire » sur l’actualité… je ne me suis jamais tu. Mais les paroles vaines me deviennent insupportables.
      Merci, M.B.
      M.B.

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      1. OLIVIER

        Yvonne Aimée n’a pas laissé que des écrits, mais la présence d’une Paix profonde dans cette clinique de Malestroit, où notre fils est décédé il y a seize ans, et où je me rends à chaque date anniversaire. Vrai seul lieu de soins palliatifs en Morbihan, et tombe toute simple (même si un peu plus imposante que pour les autres sœurs) en arrière de la clinique où un jour, un arc-en-ciel complet m’a été offert.
        En août 1922, il y a donc cent ans, elle reçoit la prière, qui inspirera profondément la communauté : « Ô Jésus, Roi d’Amour, j’ai confiance en Votre Miséricordieuse Bonté
        Olivier

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  6. Balier J-J

    Oui ,comme vous l’ ecrivez, nous sommes  » seuls pour rèagir aux defis qui nous attendent » mais cette solitude a commencèe au moment du choix ( pour ceux qui ont pû) de l’ injection que vous defendiez sous pretexte scientifique.Quant on voit ce qu’ il en est maintenant.Ce même totalitarisme que vous denoncer etait dèja en marche
    .Nous n’ avons plus d’ illusions sur nos guídes.le mérite de l’ époque actuelle est de nous ouvrirles yeux.

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      1. Balier J-J

        Depuis ce que Pfizer á reconnu ( manquement au príncipe de prècaution) avec l’ excuse de l’ urgence.Je ne sais pas très bien la nommer.Simplement,a mon nívea u je peux vous parler de ma voisine Gerta 69 ans ,bon état general, dècédèe 2jours après la 2° injectíon.Etant étrangère son gouvernement a demandè une autopsie pour mort suspecte ,qui a confirmèe l’ anevrisme.On sait maintenant ,malgrè la censure que ce cas n’ est pas isolè .Ceci dit ,j’ ai toujours beaucoup d’ interêt á vous lire. Cordialement .

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        1. Michelbenoît-mibe Auteur de l’article

          Votre voisine, oui. Si elle est morte d’une rupture d’anévrisme, c’est quelle avait déjà, depuis longtemps et sans le savoir, un anévrisme. C’est-à-dire une malformation d’une de ses artères, laquelle pouvait « claquer » à tout moment. Le vaccin a-t-il provoqué ce « claquement » ? Il est impossible de le prouver. Et trop facile d’en faire porter la responsabilité à un vaccin injecté à 2 ou 300 millions de personnes (et +++ plus avec les rappels !).
          Un anglais débarque à Boulogne. Il voit une française rousse et écrit sur son calepin : « Oah, Toutes les françaises sont rousses ! »
          Bonne journée, M.B.

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